Citations et extraits

 

 

 

 

 

par

 

 

 

 

 

Émile BERNARD

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Acceptons la Raison comme la metteuse en ordre de nos aperceptions sensuelles ; l’Esprit comme l’accoucheur des Idées contenues sous ces aperceptions, et l’Âme comme une intuition divine qui conduit ces idées de leur effet à leur fin ; aussitôt toutes les faces de l’art nous deviennent claires. Un rationnel n’est pas un spiritualiste, un spiritualiste n’est pas un mystique. La Raison montre, établit l’ordre et la Beauté, la Spiritualité dégage le moi imaginatif, le Mysticisme découvre le Sublime. Titien est du domaine de la Raison, ainsi que Poussin, ainsi qu’Ingres (il y a plus ou moins de froideur selon la sensibilité). Vinci est du domaine spirituel ; Michel-Ange du monde sublime. Chez les Grecs l’art n’atteignit à son total – Phidias – que grâce au mysticisme platonicien. Le Beau est circonscrit, le Sublime non. Il y a débordement dans les Parques, ce sont des femmes devenues des monuments. L’Art chrétien n’a rompu le Beau grec que pour l’étendre jusqu’au Sublime : Michel-Ange, les cathédrales... Dieu est le Sublime même. L’artiste qui voit Dieu dans la nature ne peint plus de la matière ; il est – s’il fait du paysage – Claude Lorrain ou Corot. Raphaël a commencé par la Grâce, continué par le Beau, fini par le sublime. Voilà les progrès d’un homme de génie, il remonte des Sens à l’Esprit et de l’Esprit à l’Âme.

 

Émile BERNARD, Charles Baudelaire critique d’art,

suivi de : Le Symbolisme pictural..., Bruxelles,

Éditions de la Nouvelle Revue Belgique, s. d., p. 39.

 

Recueilli dans Les créateurs et le sacré,

par Camille Bourniquel et

Jean Guichard-Meili,

Cerf, 1956.

 

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L’erreur du premier symbolisme fut de ne représenter qu’une abstraction, en dépouillant de vie, par une technique immuable, les aspects du monde ; en les momifiant dans une stratification méthodique. En un mot, le système remplaça la sensibilité par le procédé, supprima l’émotion en mutilant l’œuvre de laideur et de sécheresse. L’impénétrabilité d’un art ayant aboli le sentiment le rend obscur et mort.

Le véritable symbolisme, don de l’instinct poétique, part d’une conception, et entoure ce noyau centrique de toute la chair humaine, le nourrissant des éléments capables d’atteindre l’âme et d’éveiller la pensée. Il poursuit le lyrisme intérieur, transforme les données naturelles, afin de les élever au point le plus haut de la Contemplation et du Rêve. Il eu fait le tambour de résonance frappant les sens et, par eux, ce qu’il y a de plus profond en nous. Le souffle intérieur pousse ses manifestations jusque dans le monde matériel et propose la puissance émotive. La volonté s’ensevelit sous l’enthousiasme, et l’étincelle illuminatrice féconde les formes et lie l’ensemble. Le surnaturel devient ainsi le Vrai, le Parfait, le Réel.

Il n’y a de symbolisme plastique qu’à ce prix et c’est celui des plus grands.

Le Beau est le visage de Dieu.

 

Émile BERNARD, Charles Baudelaire critique d’art,

suivi de : Le Symbolisme pictural..., Bruxelles,

Éditions de la Nouvelle Revue Belgique, s. d., p. 39.

 

Recueilli dans Les créateurs et le sacré,

par Camille Bourniquel et

Jean Guichard-Meili,

Cerf, 1956.

 

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Si le Christ avait peint, il n’aurait rien fait qui ne fût divinisé. Placez-vous de ce point de vue, vous chrétiens, et vous aurez la vraie conception de l’art.

 

Émile BERNARD, Sur l’art et sur les maîtres,

Paris, Éditions de la Douce France, 1922.

 

Recueilli dans Les créateurs et le sacré,

par Camille Bourniquel et

Jean Guichard-Meili,

Cerf, 1956.

 

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Imaginez que vous travaillez pour satisfaire un Dieu, et non les hommes.

 

Émile BERNARD, Sur l’art et sur les maîtres,

Paris, Éditions de la Douce France, 1922.

 

Recueilli dans Les créateurs et le sacré,

par Camille Bourniquel et

Jean Guichard-Meili,

Cerf, 1956.

 

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Le Christ disait aux siens : Vous verrez Dieu. L’art dit aussi cela aux siens.

 

Émile BERNARD, Sur l’art et sur les maîtres,

Paris, Éditions de la Douce France, 1922.

 

Recueilli dans Les créateurs et le sacré,

par Camille Bourniquel et

Jean Guichard-Meili,

Cerf, 1956.

 

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Être artiste, c’est unir l’œuvre de Dieu à la sienne. Non pas la matière, mais l’esprit divin à son âme.

 

Émile BERNARD, Sur l’art et sur les maîtres,

Paris, Éditions de la Douce France, 1922.

 

Recueilli dans Les créateurs et le sacré,

par Camille Bourniquel et

Jean Guichard-Meili,

Cerf, 1956.

 

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L’art est divin quand il est le résultat de notre union à Dieu par la nature.

 

Émile BERNARD, Sur l’art et sur les maîtres,

Paris, Éditions de la Douce France, 1922.

 

Recueilli dans Les créateurs et le sacré,

par Camille Bourniquel et

Jean Guichard-Meili,

Cerf, 1956.

 

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Dans la peinture, comme dans la sainteté, il faut la folie du surnaturel.

 

Émile BERNARD, Sur l’art et sur les maîtres,

Paris, Éditions de la Douce France, 1922.

 

Recueilli dans Les créateurs et le sacré,

par Camille Bourniquel et

Jean Guichard-Meili,

Cerf, 1956.

 

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Notre sensibilité est le clavier sur lequel l’œuvre de Dieu résonne ; mais elle doit résonner en esprit, et non pas en désir de l’imitation littérale.

 

Émile BERNARD, Sur l’art et sur les maîtres,

Paris, Éditions de la Douce France, 1922.

 

Recueilli dans Les créateurs et le sacré,

par Camille Bourniquel et

Jean Guichard-Meili,

Cerf, 1956.

 

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« Pourquoi ne peignez-vous pas un Christ ? demandai-je à Cézanne, que j’étais heureux de trouver si croyant. – Je n’oserais jamais, me répondit-il. D’abord, cela a été fait mieux que par nous, et puis ce serait trop difficile. »

 

Émile BERNARD, Souvenirs sur P. Cézanne, Paris,

Rénovation esthétique, 1921, p. 70.

 

Recueilli dans Les créateurs et le sacré,

par Camille Bourniquel et

Jean Guichard-Meili,

Cerf, 1956.

 

 

 

 

 

 

 

 

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