Augustin Cochin

 

DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES MORALES, ÉCONOMISTE,

ADMINISTRATEUR, PUBLICISTE, (4823-1872)

 

 

 

 

 

par

 

 

 

 

 

Armand BARAUD

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Que mes enfants apprennent, en me voyant,

ce que c’est que la paix d’une mort chrétienne. »

(COCHIN.)

 

 

La mort de M. Cochin fut une perte pour toutes les bonnes œuvres en France, en 1872.

Né à Paris le 12 décembre 1823, Augustin Cochin comptait depuis longtemps dans sa famille des membres distingués dans les arts, le barreau, l’administration et le clergé. On se souvient d’Henri Cochin, un des célèbres avocats du XVIIIe siècle ; du vénérable Cochin, doyen des échevins de Paris, botaniste distingué ; de Denis Cochin, curé de Saint-Jacques du Haut-Pas, véritable héros de piété et de charité, fondateur de l’hospice qui porte son nom. Enfin l’aïeul et le père de M. Augustin Cochin furent maires du XIIe arrondissement et députés.

Préparé par son éducation et les traditions de sa famille aux fonctions administratives, le héros de cette notice a fait partie, jeune encore, d’une foule de sociétés de bienfaisance et de commissions importantes. Sa fortune lui permettant l’indépendance, son temps fut consacré à d’incessants travaux d’assistance charitable et d’économie sociale. L’Académie des sciences morales les avait consacrés en l’admettant parmi ses membres. Il fut nommé adjoint, puis maire du Xe arrondissement en 1853. Envoyé, en 1871, comme administrateur d’un de nos départements les plus importants, il avait pris sa mission tellement à cœur, qu’il est mort littéralement à la peine au bout de quelques mois.

Il avait publié un grand nombre d’articles sur l’économie sociale dans les Annales de la charité et le Correspondant. L’Univers lui a consacré les lignes suivantes :

« La bonté, telle est la première et la plus grande des qualités de l’homme ; ce fut aussi le caractère fondamental du serviteur de Dieu que la mort nous a si prématurément enlevé. Il était parfaitement bon ; il l’était par nature et par grâce, pour toutes personnes et pour toutes choses, mais particulièrement pour tout ce qui est petit, souffrant et déshérité des biens de la terre.

« C’est de ce côté que l’inclinait le penchant chrétien de son âme.

« Qui dira sa bonté pour les malheureux, son active charité, son zèle pour les bonnes œuvres, ses tendresses pour les vieillards des Petites Sœurs des pauvres et pour les enfants incurables qu’il se plaisait à visiter, à consoler, à servir dans l’asile qu’il avait contribué à leur élever ? « Bienfaiteur des pauvres, disait-il à la sœur qui le veillait dans sa dernière maladie, quel beau titre ! c’est le seul que j’aie ambitionné ! »

« Causeur aimable et brillant, il était un lecteur incomparable ; un sermon de Bossuet lu par lui était un plaisir de roi. Le soir, on s’agenouillait dans le salon, et la prière faite en commun à haute voix, à laquelle il présidait, avec une voix grave et recueillie, terminait dignement des jours où la pensée de Dieu avait toujours été présente. C’était bien la maison chrétienne, demeure de la vertu, foyer du devoir et de cette joie robuste qui est l’épanouissement de la bonne conscience.

« Partisan des idées libérales, il eut des adversaires, mais il n’eut pas d’ennemis. Il comptait au contraire des amis très dévoués et très chers dans toutes les opinions. Pour moi, qui ne partageais nullement ses espérances et ne voyais dans les prétendus principes modernes qu’un piège et un danger pour la liberté chrétienne, au lieu d’y voir, comme lui, une nécessaire garantie, j’ai salué le Syllabus comme une parole aussi souverainement raisonnable que divinement vraie ; je ne me suis jamais aperçu que ce dissentiment ait jeté le moindre trouble dans nos relations intimes et notre mutuelle affection.

« Si, dans ces questions délicates, son jugement faillit quelquefois, ainsi que l’a prouvé le mot suprême prononcé par l’Esprit-Saint qui a clos toute discussion, sa volonté resta toujours attachée à ce qu’il considérait comme la justice et la vérité. Son cœur, profondément chrétien, se soumit absolument, je le sais, alors même que son esprit eût été tenté de résistance ; et, après avoir vécu en catholique fervent, il mourut dans la paix humble et obéissante d’un véritable enfant de l’Église romaine.

« Ses derniers jours furent remplis de souffrances chrétiennement supportées, de paroles et d’actes d’amour qui se ressentaient déjà du voisinage du ciel. Il comprit, du premier moment, que le coup était mortel ; il mesura toute l’étendue de son sacrifice, il l’accepta et l’accomplit héroïquement. Au milieu de ses souffrances, tout en lui respirait la résignation et la sérénité. »

« – Que mes enfants apprennent, en me voyant mourir, répétait-il, ce que c’est que la paix d’une mort chrétienne. »

« Aux approches de la mort, cette paix se changea en une joie ineffable, et la béatitude céleste devint visible sur ses traits mourants. Plus d’une fois, il dit avec sainte Thérèse : « Mon Dieu, il est temps que je vous voie ! »

« Son dernier mot, la veille de sa mort, fut celui-ci : « Je suis si heureux ! » Après cela il perdit la parole.

« C’est ainsi que mourut Augustin Cochin, après une courte vie de quarante-huit ans, pendant lesquels il ne voulut que le bien et ne fit que des heureux. »

 

 

 

Armand BARAUD, Chrétiens et hommes célèbres au XIXe siècle,

Tours, Maison Alfred Mame et Fils.

 

 

 

 

 

 

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