Dolentes, quærebamus te

 

 

Ô Vierge, qu’avez-vous ? pourquoi cette vitesse ?

De la plaine et des monts vous courez les chemins !

             Des passants, tous pris de tristesse,

                     Vous saisissez les mains.

 

Vous leur dites : « Mon âme aux douleurs est en proie :

J’ai perdu mon enfant ! Ah ! parlez, l’auriez-vous ? »

              « Non ! – font-ils. – Le ciel et sa joie

                     Brilleraient parmi nous. »

 

Vous dites à la rose : « À l’aube, avec l’abeille,

As-tu vu mon Enfant respirer ton odeur ?

              « Non ! – fait-elle. – Moi, fleur vermeille,

                     J’aurais plus de splendeur. »

 

Vous dites au palmier : « Quand venait l’heure sombre,

As-tu vu mon Enfant sous tes branches s’asseoir ? »

              « Non ! – fait-il. – Sur mon front moins d’ombre

                     Se répandrait, ce soir. »

 

Vous dites au ramier : « Pour écouter ta plainte,

As-tu vu mon Enfant pénétrer dans ce bois ? »

              « Non ! – fait-il. – Ma force est éteinte ;

                     Il m’eût rendu la voix. »

 

Vous dites au rocher : « Ces cavités où j’entre,

As-tu vu mon Enfant s’y dérober sans bruit ? »

              « Non ! – fait-il. – Ses yeux de mon antre

                     Auraient chassé la nuit. »

 

Vous dites au ruisseau qui chante sur la mousse :

« As-tu vu mon Enfant boire dans ton cristal ? »

              « Non ! – fait-il. – Mon eau pure et douce

                     Guérirait de tout mal. »

 

Vous remontez au Temple, et votre âme en détresse

Dit à ses murs sacrés votre poignant souci :

              « Voyez, – fait-il, – mon allégresse :

                     Votre Enfant est ici ! »

 

 

 

F.-H. BAUDRY, des Frères Prêcheurs.

 

Paru dans L’Année des poètes en 1894.

 

 

 

 

 

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