Les croisades

 

 

Amour

Plus fort que notre amour

Plus fort que la chaleur

Qui remue sous la table

Je pars

Et rien n’est bleu comme cette ombre nue

 

Femme

Tu m’attendras

Chaque moment chaque heure

Me rapproche de toi

Et tu ne comprends pas

Dieu parle dans les oliviers

Le sang

Les ronces sur le cœur m’appellent

Et ce corps douloureux qui baigne l’horizon

 

Femme plus douce que raison

Plus fidèle que la pluie

Je pars

Et c’est ainsi que tu m’attends

Bras, rose attentive à l’orée des saisons

 

 

                        *

                     *    *

 

Rien que le sable et l’air

Et ce désir farouche

Ta bouche lourde sur ma bouche

L’empreinte bleue du sein

Dans la paume encor fraîche

 

Ici

L’arbre se fond

Se confond avec l’herbe

Mais l’âme dégagée

A pris de la hauteur

 

Soleil

Éclatement des yeux

Soleil en marche

 

Des mois et des années

Et cette fleur au cœur qui ne s’est pas fanée

Le dernier compagnon

Et le dernier visage

Tous ces haillons dorés qui font le paysage

Une fumée là-bas

La première douceur

 

 

                        *

                     *    *

 

Jérusalem

Et des oiseaux sont nés

Quand les mains ont jailli

Dans la lumière

Mille hommes chantent

Pleurent de joie

Seigneur

Et c’est la même voix

Le ciel est très doux

Sur les têtes

Des enfants sont partis rechercher les troupeaux

Juste le temps qu’il faut

Pour t’aimer

Pour sourire

Pour cerner ton sommeil de gestes maladroits

 

Et maintenant

Dormir

Être une force reposante

Sur son épaule

Pour longtemps.

 

 

 

René-Guy CADOU,

La vie rêvée.

 

 

 

 

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