L’arc-en-ciel de l’alliance

 

 

Quand tous nos cœurs émus battaient pour la Russie,

J’eus une vision qui me fit tressaillir.

Pour un rêve si beau, je donnerais ma vie ;

Je verserais mon sang pour le voir s’accomplir.

 

La tempête expirait sous l’éclair diaphane ;

Je vis un arc-en-ciel, brillant des trois couleurs :

Sur un globe d’azur, debout, la chaste Jeanne,

Triomphante, montrait les champs de Vaucouleurs ;

 

Et, de la voix du cœur que rien ne saurait rendre :

« Russes, Français, dit-elle, aimez-vous, aimez-vous !

« De nos héros tombés j’ai ranimé la cendre ;

« L’avenir radieux, l’avenir est à nous !

 

« Non, par l’âme du Christ, la France n’est pas morte.

« J’ai dit au fier Teuton : Je briserai tes fers ;

« J’ai dit à notre Sœur, si vaillante et si forte :

« Vous ferez resplendir la paix dans l’univers. »

 

Elle dit, et les mains en croix sur sa poitrine,

Figurant l’Alliance au banquet fraternel,

Elle laissa tomber une larme divine,

Et je la recueillis dans ma coupe de fiel.

 

Je voulus ressaisir l’image évanouie ;

J’interrogeai la mer, l’étoile, le ciel bleu ;

Jeanne avait pris l’essor ; l’Ange de la Patrie

S’envolait en chantant : « France héroïque, adieu ! »

 

 

 

A. CAMINAT.

 

Paru dans L’Année des poètes en 1897.

 

 

 

 

 

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