À mon père

 

 

Quand la première fleur au champ des morts rayonne,

J’aime à te visiter, ô modeste colonne,

Qui rappelles le nom de mon père chéri ;

Devant toi je m’incline en fermant les paupières,

Et mon âme redit de ferventes prières

Pour le chrétien qui dort sous ce gazon fleuri.

 

Méprisant les honneurs que l’orgueilleux envie,

Sans fiel il traversa le sentier de la vie

En pratiquant toujours la foi de ses aïeux.

Il n’aura pas sa place aux pages de l’histoire,

Mais son nom restera gravé dans la mémoire

Des plus pauvres que lui qu’il aida de son mieux.

 

Il est là, maintenant, sous quelques pieds de sable,

Cet honnête vieillard, doux, généreux, affable,

Qui ne faillit jamais aux règles de l’honneur.

Chrétiens, qui visitez ce sombre coin de terre,

Où l’oiseau, plein d’émoi, gazouille avec mystère,

Ah ! daignez pour mon père implorer le Seigneur !

 

 

12 juillet 1883.

 

 

J.-B. CAOUETTE,

Les voix intimes, 1892.

 

 

 

 

 

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