Ce que l’Amour a de plus doux...

 

 

Ce que l’Amour a de plus doux, ce sont ses violences ;

son abîme insondable est sa forme la plus belle ;

se perdre en lui, c’est atteindre le but ;

être affamé de lui c’est se nourrir et se délecter ;

l’inquiétude d’amour est un état sûr ;

sa blessure la plus grave est un baume souverain ;

languir de lui est notre vigueur ;

c’est en s’éclipsant qu’il se fait découvrir ;

s’il fait souffrir, il donne pure santé ;

s’il se cache, il nous dévoile ses secrets ;

c’est en se refusant qu’il se livre ;

il est sans rime ni raison et c’est sa poésie ;

en nous captivant il nous libère ;

ses coups les plus durs sont ses plus douces consolations ;

s’il nous prend tout, quel bénéfice !

c’est lorsqu’il s’en va qu’il nous est le plus proche ;

son silence le plus profond est son chant le plus haut ;

sa pire colère est sa plus gracieuse récompense ;

sa menace nous rassure

et sa tristesse console de tous les chagrins :

ne rien avoir, c’est sa richesse inépuisable.

 

 

 

HADEWIJCH D’ANVERS, Poèmes spirituels.

 

Traduit du moyen-néerlandais par frère J.-B. P.

 

Recueilli dans Dieu et ses poètes, par Pierre Haïat,

Desclée de Brouwer, 1987.

 

 

 

 

 

 

 

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