Garde ton cœur

 

 

Je te vois venir, au bord de la route,

Brunette des champs, fille de chez nous.

À te voir passer, plus d’un gâs, sans doute,

De près ou de loin, te font les yeux doux ;

 

Ne les laisse pas te conter fleurette,

Ils ne peuvent point t’offrir le bonheur.

Ah ! garde ton cœur, faluron lurette,

Ah ! garde ton cœur pour un moissonneur !

 

Si les beaux messieurs d’une belle ville,

Jolis chapeaux durs et jolis souliers,

Esclaves du luxe et de l’or servile,

Viennent déposer leur cœur à tes pieds ;

 

Ne les laisse pas te conter fleurette,

Ils ne peuvent point t’offrir le bonheur.

Ah ! garde ton cœur, faluron lurette,

Ah ! garde ton cœur pour un moissonneur !

 

Car le ciel te veut à la place même

Où doivent germer les blés d’autrefois.

Aux beaux cavaliers qui diront : je t’aime !

Réponds fièrement de ta douce voix :

 

Ah ! ne venez pas me conter fleurette.

Vous ne pouvez point m’offrir le bonheur.

Je garde mon cœur, faluron lurette.

Je garde mon cœur pour un moissonneur !

 

 

Blanche LAMONTAGNE.

 

Paru dans Le Parler français, bulletin de la Société

du Parler français au Canada, en septembre 1914.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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