Invocation à la nuit

 

 

Nuit d’été, ne crains pas de descendre en moi-même,

                Car mon cœur n’est jamais fermé,

Il vibre de chansons, il vit, il croit, il aime

                Comme un éternel affamé.

                Et s’il renonce à ses folies

Il reste, cependant, ouvert aux harmonies

Des sourires humains, des éveils, des retours,

                Et des merveilleuses amours.

 

Nuit d’été, donne-moi l’espoir dans la justice,

                Et que ta paix anéantisse

                Le jeu cruel des vanités.

                              Que ta beauté

                      S’accorde à ma prière,

                Que j’oublie un peu la matière,

                Les mensonges, les faux semblants,

Le sourire des sots qui s’en vont triomphants

                      Parce qu’ils ont l’audace

De croire qu’on regarde et aime leur grimace.

 

Nuit d’été si limpide, apaise ma colère,

              Que ma tendresse de naguère

                      Puisse revivre en moi

              Retrouver son ancienne foi,

Et l’objet d’un nouvel amour fort et vivace

              Qui me transforme de sa grâce

                      Et m’apporte le don

              De la pitié et du pardon.

 

Nuit d’été, verse-moi ton lumineux mystère,

Dans une ombre sans loi laisse dormir la terre,

                      Afin qu’en sa ronde du soir

                      Elle transcende son espoir.

Va porter ma pensée à ceux qui désespèrent,

              Que des doigts aimants se ressèrent,

                      Et que les opprimés

Sachent qu’ils ont le ciel en eux, s’ils sont aimés.

 

 

 

Reine MALOUIN, Signes perdus, 1964.

 

 

 

 

 

 

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