Je vis

 

 

Je vis ! oh ! quel réveil que cette heure première !

Je vis ! et l’univers pour recevoir son roi

S’ouvre ainsi qu’un palais inondé de lumière,

Dois-je en croire mes yeux ? Tant de splendeur pour moi !

 

Déroule, firmament, ton dais semé d’étoiles

D’où le rêve sourit à mon calme sommeil ;

Bercez-moi, flots des mers, à l’ombre de vos voiles ;

Comme une lampe d’or, resplendis, ô soleil !

 

Dressez vos blancs sommets, monts couronnés de neige :

Alpes, n’êtes-vous pas les colonnes des cieux ?

Entre vos bleus piliers – majestueux cortège –

Que l’aigle m’accompagne en son sol glorieux !

 

Fleurs, frais trésors auxquels il ne manque qu’une âme,

Répandez dans les airs vos parfums enivrants ;

Pour chanter, doux oiseaux, le bonheur qui m’enflamme

De vos gosiers versez l’harmonie à torrents !

 

Et cependant qu’es-tu, nature inanimée ?

Quel écho donc as-tu pour répondre à ma voix ?

Je vis ! je veux trouver, dans une image aimée,

De moi-même un vivant miroir où je me vois.

 

Salut ! regards d’azur où le ciel semble luire,

Où tout est rayon, joie, ineffable plaisir !

Épanouis-toi, lèvre, à mon premier sourire,

Comme s’ouvre la fleur au baiser du zéphyr.

 

Faut-il qu’ainsi sur moi la jouissance pleuve !

Ah ! l’amitié me donne une âme pour m’aimer,

Et, quand se lèveront les sombres jours d’épreuve –

Oreiller de l’amour – un cœur pour reposer !

 

Je vis ! je ne suis pas ce qu’au jour est la rose

Qu’effeuille le toucher de l’automne cruel :

Non, non ! je vis et je sens en moi quelque chose

Qui ne saurait mourir, comme un souffle immortel !

 

Dans le chœur d’ici-bas, c’est ma voix qui domine,

Souveraine, au-dessus de tous les éléments ;

Et, céleste flambeau, ma raison illumine

Cette terrestre nuit de ses rayonnements.

 

Des êtres je comprends l’harmonie éternelle,

Le lien étroit qui tient l’homme à l’ange uni.

Je gravis, ô transports ! cette sublime échelle

Qui part de la matière et touche à l’infini !

 

Et ces merveilles dont le spectacle magique

M’élève, nuit et jour, sur des ailes de feu –

Cieux et terre – ah ! ne sont encor que le portique

De la gloire d’un monde où se révèle Dieu !...

 

Quand tous les maux fondraient maintenant sur ma tête

Je te bénis, auteur de ma félicité !

Malgré ses pleurs amers, la vie est une fête :

Oui ! je te bénirai toute l’éternité !

 

 

 

Moïse-Joseph MARSILE, Épines et fleurs.

 

 

 

 

 

 

 

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