La prière de la fin

 

 

                                                           Mentre che la speranza ha fior del verde.

                                                                                       DANTE, Le Purgatoire.

 

 

Seigneur, endormez-moi dans votre paix certaine

Entre les bras de l’Espérance et de l’Amour.

Ce vieux cœur de soldat n’a point connu la haine

Et pour vos seuls vrais biens a battu sans retour.

 

Le combat qu’il soutint fut pour une Patrie,

Pour un Roi, les plus beaux qu’on ait vus sous le ciel,

La France des Bourbons, de Mesdames Marie,

Jeanne d’Arc et Thérèse et Monsieur Saint Michel.

 

Notre Paris jamais ne rompit avec Rome.

Rome d’Athène en fleur a récolté le fruit,

Beauté, raison, vertu, tous les honneurs de l’homme,

Les visages divins qui sortent de ma nuit :

 

Car, Seigneur, je ne sais qui vous êtes. J’ignore

Quel est cet artisan du vivre et du mourir,

Au cœur appelé mien quelles ondes sonores

Ont dit ou contredit son éternel désir

 

Et je ne comprends rien à l’être de mon être,

Tant de Dieux ennemis se le sont disputé !

Mes os vont soulever la dalle des ancêtres,

Je cherche en y tombant la même vérité.

 

Écoutez ce besoin de comprendre pour croire !

Est-il un sens aux mots que je profère ? Est-il,

Outre leur labyrinthe, une porte de gloire ?

Ariane me manque et je n’ai pas son fil.

 

Comment croire, Seigneur, pour une âme que traîne

Son obscur appétit des lumières du jour ?

Seigneur, endormez-la dans votre paix certaine

Entre les bras de l’Espérance et de l’Amour.

 

 

 

Charles MAURRAS, Clairvaux, juin 1950.

 

 

 

 

 

 

 

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