Nativité

 

 

 

Lorsque le temps approcha, alors que les autres femmes sont tristes et incommodées, Marie était allègre et joyeuse et cependant son corps portait véritablement le corps du fils de Dieu dans sa perfection. Marie ne savait pas d’avance à quel moment Dieu naîtrait d’elle, jusqu’à ce qu’elle le vît sur son sein pendant le trajet durant la nuit de Bethléem, la ville étrangère où elle n’était elle-même qu’une pauvre étrangère à qui on avait refusé l’hospitalité. Le Dieu tout-puissant avec sa sagesse, le Fils éternel avec sa réalité humaine, l’Esprit-Saint avec sa suavité pénétrèrent le corps de Marie de leurs délices, sans la moindre douleur, de même que le soleil envoie avec une amoureuse quiétude ses rayons sur la douce rosée. Lorsque Marie vit son bel enfant, elle se pencha sur son visage et dit : « Soyez le bienvenu, mon innocent enfant et mon puissant Seigneur, à qui toutes choses appartiennent. »

Marie prit sous la selle de Joseph une étoffe rude qui se trouvait sur le dos de l’Âne et, également, la partie supérieure de la tunique qu’elle avait revêtue quand elle portait Notre-Seigneur ; elle noua l’autre partie autour de son corps. Dans ces langes, la tendre Vierge enveloppa le grand Sauveur et le posa dans la crèche. Et aussitôt il pleura comme le font les nouveau-nés, car tout le temps qu’ils ne peuvent parler, les enfants ne pleurent pas sans une juste nécessité. Ainsi fit Notre-Seigneur lorsque, en dépit de sa haute noblesse, il se vit si durement couché dans une étable à cause de la malice du péché. Il pleurait sur tout le genre humain et cachait sa félicité et sa puissance. La Vierge s’affligeait, elle aussi, et l’enfant ayant faim et froid, sa mère l’apaisait ; c’étaient là la volonté du Père et les délices de l’Esprit-Saint. La Vierge s’inclinait, pleine d’amour maternel et de virginale modestie, sur son enfant affligé et lui donnait le sein.

 

 

 

MECHTILDE DE MAGDEBOURG.

 

Traduit du moyen-haut allemand

par Jeanne Ancelet-Hustache.

 

 

 

 

 

 

 

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