La lampe

 

 

La lampe est seule auprès du berceau. L’enfant dort.

La lampe, en attendant que la mère revienne,

Couve le nouveau-né d’un tiède regard d’or

Et veille auprès de lui comme une aïeule ancienne.

 

Elle est émue, elle est heureuse. Avant ce soir

Elle n’avait jamais vu l’enfant de ses maîtres,

Ni gardé toute seule ainsi le fragile être

Qu’on emporte dormir aussitôt qu’il fait noir.

 

Légèrement, et du plus pur de sa lumière,

Elle touche au berceau, craintive, hésite autour,

Puis, osant à la fin, elle frémit d’amour

En sentant les beaux yeux trembler sous la paupière.

 

À loisir maintenant, d’un baiser long et doux

Elle effleure le front et parcourt le visage,

Contente de trouver en cette jeune image

Les traits confus encor des hommes de chez nous.

 

Mais l’enfant, au frôler d’un rayon sur sa tempe,

Se réveille, et, tendant, ouverts, ses petits doigts,

À pleines mains, ainsi qu’à sa mère parfois,

Il veut prendre le bon visage de la lampe...

 

 

Louis MERCIER, Le Poème de la maison.

 

Recueilli dans Les poèmes du foyer.

 

 

 

 

 

 

 

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