Vers

 

 

                 Et nunc dimittis servum tuum, Domine,

                 Secundun verbum tuum, in pace.

 

Sur les autres et sur toi-même

Laisse descendre le pardon :

Moins de morgue, plus d’abandon

Sied à la défaite suprême.

 

Ressemble, indifférent et doux,

À l’ouvrier qui, sa journée

Rigoureusement terminée,

S’assied, les coudes aux genoux.

 

Laisse faire le reste au Maître.

Tu trouves injuste sa loi :

Comme il en sait plus long que toi,

Ses raisons sont bonnes peut-être.

 

Voici qu’il te renvoie en paix,

Selon une promesse ancienne :

L’œuvre de demain est la sienne ;

Dans ton zèle tu te trompais.

 

Au jour se mesure l’ouvrage,

À chaque travailleur sa part,

Et l’heure sonnant du départ,

On n’exige pas davantage.

 

Tu voulus tout faire en un jour,

Prendre à toi seul toute la tâche :

Ta faute n’était point d’un lâche,

Mais place aux jeunes : c’est leur tour.

 

Tu comprenais les cœurs d’apôtres :

Avais-tu leur âme et leurs bras ?

Résigne-toi donc sans fracas,

Et pour toi-même et pour les autres.

 

Consens au mal universel...

Avec la secrète espérance

Qu’en dépit de l’invraisemblance,

Le mot de l’énigme est au ciel.

 

 

 

Frédéric PLESSIS.

 

Paru dans Le Spectateur catholique en juillet 1897.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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