Adieu grande tour

 

 

Adieu grande tour de schiste,

Centaures affrontés de marbre rose,

Touffes d’herbe d’amour, souvenir

Jaillissant d’un tertre au pied d’un mort,

Et vous, cloche abandonnée

Qui vous maintenez sans abri

Pour regarder dans la dévalée

L’éternité d’un champ de bruyère.

Adieu éternelle Serrabone,

L’ange y tourne saintement

En un instant et au-delà des siècles

La feuille d’un livre transparent.

Si la prière est tarie,

Si on a couvert de terre les lèvres de la foi,

L’haleine des bois parvient ici

Avec sa pureté originelle.

Et quand si incertaine est notre intelligence,

Luc et Jean, Marc et Matthieu,

Saints évangélistes de Dieu,

Les morts dorment

Devant la porte ouverte

Et je vois toute la crête

Qui accueille le soir

Dans l’étendue pure et déserte.

 

 

 

Josep-Sebastià PONS.

 

Recueilli dans J. S. Pons,

par Yves Rouquette,

Seghers, 1963.

 

 

 

 

 

 

 

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