En passant

 

 

Ses cheveux sont flottants, sa taille ronde et frêle ;

Je passe à son côté, je regarde : elle est belle.

En elle tout est simple, en elle tout est pur ;

Elle a le front naïf, un doux regard d’azur,

Une bouche ingénue et des tresses dorées

Qui versent la langueur sur ses tempes nacrées ;

Un ensemble rêveur, peut-être triste au fond ;

Sa robe bleue est longue et traîne sur le pont.

C’est une jeune fille ; elle a seize ans à peine ;

Quelque chose l’occupe. Est-ce une tendre peine,

Quelque sainte prière, un amoureux souci,

Qu’à pas lents dans sa route elle promène ainsi ?

Regardant l’eau qui brille et disparaît sous l’arche,

Le front un peu penché, souriante elle marche ;

Un chapelet se joue en sa petite main,

Et du pied elle effleure à peine le chemin,

Pareille à la colombe ayant ployé ses ailes ;

C’est ainsi sur les flots que glissent les nacelles.

On dirait à la voir dans sa virginité,

Dans sa mystérieuse et calme pureté,

Un séraphin pensif, un doux ange mystique

Tombé du plafond d’or d’une abside gothique...

 

Dire que cette enfant, si belle de pudeur,

Avec ses grands yeux bleus étonnés de candeur,

Ses longs cheveux bouclés que la brise taquine,

Sera dans l’avenir peut-être une coquine !

 

 

 

Georges de PORTO-RICHE, Tout n’est pas rose, 1877.

 

 

 

 

 

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