Communion de la nuit de Noël

 

 

                              C’est le dernier degré qui m’approche de toi,

                              C’est le voile qui tombe entre ta face et moi.

                                                                       (LAMARTINE.)

 

 

Viens aux accents de ma voix expirante,

Christ adoré ! grâce, ne tarde plus.

L’heure est venue ; oui, l’heure délirante

Où ton amour appelle ses élus.

 

Mon œil se trouble et mes genoux faiblissent,

Ma voix se tait, mon sang s’est arrêté ;

Ne tarde plus, car mes lèvres pâlissent,

Et tout mon cœur dans le tien s’est jeté.

 

Qu’en me levant, tout entier je t’emporte,

Comme une flamme éternelle et sans fin,

Comme la mère, hélas ! sublime et forte

Qui tout vivant te portait dans son sein.

 

Mais viendras-tu dans l’âme indifférente

Où de l’amour les flots vont se briser ?...

Y viendras-tu ? Comme une chair brûlante,

Le froid tombeau reçoit-il un baiser ?

 

Et toi, Seigneur, Créateur de nos âmes,

Toi qu’en tremblant nous venons adorer,

Es-tu jaloux des sympathiques flammes.

Dont l’homme-Dieu veut ici s’entourer !

 

Qu’exiges-tu pour cette heure enivrante,

Pour cette nuit arrachée à ton Ciel,

Où ma pensée a vécu palpitante,

Comme les morts au souffle d’Ézéchiel ?

 

Veux-tu mon âme et toutes ses ivresses ?

Veux-tu mon cœur, où ta lumière a lui ?

Veux-tu ravoir les divines promesses ?

Ah ! reprends tout !... tout ce qui n’est pas Lui !

 

Oui, sans regret, Seigneur, je t’abandonne

Mes jours comptés et mes sens éperdus,

Ma part du ciel à celui qui me donne

Le Christ fait chair un quart d’heure de plus.

 

 

 

Adine RIOM,

Reflets de la lumière,

1857.

 

 

 

 

 

 

 

www.biblisem.net