Chant pour l’inauguration

du nouveau tombeau

de saint Yves

 

 

Quand les Bretons voyaient passer dans la campagne

Saint Yves revêtu de son vieux manteau gris,

Ils se disaient que Dieu l’avait mis en Bretagne

Pour défendre des Grands les faibles, les petits.

 

Sur cette terre il fut l’homme de la Justice ;

À tous il enseignait la sainte Vérité.

Il désarmait la haine et corrigeait le vice,

Par ses douces vertus et son austérité.

 

Un jour qu’en son manoir, avec des soins de mère,

Il lavait un lépreux trouvé sur son chemin,

Le front du mendiant s’entoura de lumière,

Et c’était Jésus-Christ qui disparut soudain.

 

Ô ville de Tréguier, ô cathédrale antique,

Rivages du Jaudy bordés de verts coteaux,

Vous l’avez entendu, dans sa langue celtique,

Prêchant le grand Dieu juste aux loups comme aux agneaux !

 

Il voulut que la Mort le prît dans sa chapelle,

Sous ses habits de prêtre, étendu devant Dieu.

Dès qu’il fut endormi dans la paix éternelle,

Une foule innombrable envahit le saint lieu.

 

On emporta son corps en pompe triomphale,

Parmi les fleurs, l’encens, paré comme un trésor ;

Et le Duc de Bretagne, en cette cathédrale,

Lui bâtit un tombeau tout resplendissant d’or.

 

À son nom s’éveillaient, sur leurs couches funèbres,

Des enfants dont la mère avait fermé les yeux ;

Les marins l’invoquaient au milieu des ténèbres,

Et leurs barques passaient les brisants périlleux.

 

Il est venu le temps de réparer l’outrage

Fait dans des jours sanglants à ses restes bénis.

Un monument nouveau d’un merveilleux ouvrage,

Apparaît glorieux aux Bretons réunis.

 

Ô saint Yves, toujours protégez la Bretagne !

Qu’elle aime, comme vous, l’Honneur, la Vérité,

La Justice qui fut partout votre compagne !

Gardez-lui pour le Bien sa ferme volonté !

 

 

 

Joseph ROUSSE.

 

Paru dans la Revue de Bretagne et de Vendée en 1888.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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