La route lumineuse

 

 

 

                                                                        Je te fiancerai à moi pour toujours ;

                                                                        Je te fiancerai à moi dans la justice

                                                                              et le jugement,

                                                                        Dans la grâce et la tendresse.

                                                                        Je te fiancerai à moi dans la fidélité

                                                                              et tu connaîtras Yahveh.

 

                                                                        OSÉE, Livre 1, Chap. 11. 21.

 

 

Mon Dieu, hors de mon obscur sentier de misère, me voici enfin

Sur votre blanc chemin, sur la terre affermie de vos allées de lumière,

Sur la route où la sandale sait où poser le pas, sur votre haut chemin.

Et Vous me regardez monter, comme dans le rayon de soleil un grain de poussière,

Un grain de poussière enfin confondu dans la lumière.

 

Ma tête est libre des feuilles mortes, ma robe des épines et mes jambes des ronces.

Allégées, mes mains n’ont plus de recherche, plus de problème,

Et mon cœur cependant, Vous le savez, Seigneur, n’a rien d’un cœur qui renonce.

Mon cœur en ce moment sur votre route est agité d’une véhémence extrême.

Mon cœur est un cœur pardonné qui vous aime.

 

Plus que n’est fondante la chair écorchée de son duvet de la blonde et savoureuse pêche,

Plus que n’est tendre le soyeux pétale du plus doux et lisse épiderme,

Plus qu’à la margelle même du puits n’est franc le gobelet d’eau dure et fraîche,

Plus que ne s’obstine à son nid l’oiseau, plus que la terre remuée ne s’active autour de son germe,

Me tient captive et m’exalte le secret de vie que vos Évangiles renferment.

 

Au cheminement capricieux dans les villes des pas qui vont, viennent, s’annulant les uns les autres,

Je préfère, Vous le savez, ceux-ci recueillis qui pieusement à l’aube gravissent les marches de vos autels.

Comme dans chaque regard ce n’est plus une pensée d’homme, mais uniquement la vôtre,

Seigneur, que cherchent à présent mes yeux dans la quiétude de leur quotidien appel,

Dans leur feu désormais égal et essentiel.

Qu’aucun départ ne m’attire, Vous le savez, m ne m’épouvante ; qu’aucun voyage,

Aucun appel, aucune musique autrefois si exaltante, aucun projet, aucun livre

N’exerce sur moi d’emprise ou de mépris depuis que votre seul souci

Occupe jusqu’aux bords de ses beaux titubements mon cœur ivre,

Depuis, Seigneur, que Vous m’avez appris à vivre.

 

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Me voici, au sortir de mon infernal sentier, au bas, Seigneur, de votre route claire,

Au beau milieu de votre chemin de croix, de votre route de sueur, de sang et d’amour.

Mon cœur n’a plus souci de visages, ni de pays, Vous seul dans mon paysage tenez la place tout entière.

À Vous désormais l’élan et la chute, de l’aube au soir, du soir à l’aube, de chacun de mes jours,

La ligne incorruptible de tous mes carrefours.

 

Infime et conscient grain de poussière confondu dans l’1nfinie Lumière,

Mon cœur, Seigneur, est un cœur passionné qui se donne enfin tout entier, à ciel ouvert.

 

 

 

Simone ROUTIER.

 

Recueilli dans Le choix de Simone Routier

dans l’œuvre de Simone Routier, 1981.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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