Un vieux chevalier souabe à son fils

 

(CHANT DU XVIIe SIÈCLE.)

 

 

 

Fils, prends ma lance. Elle est trop pesante à mon bras ! Prends ce bouclier et ce javelot. Emmène au loin mon destrier.

 

Vois : ce casque depuis déjà cinquante ans couvre ma tête à présent blanche. Chaque année une bataille a émoussé mon épée et ma hache d’armes.

 

Le duc Rodolphe m’a honoré de cette épée, d’une hache et d’une massue, car je restai fidèle au duc, et méprisai la solde de Henri.

 

Pour la liberté coula le sang de sa main droite ! Mais le valeureux Rodolphe, avec sa main gauche, combattait encore contre le Franconien.

 

Prends l’écu et arme-toi. L’empereur Conrad se prépare ! Fils, décharge-moi de la douleur que me cause mon trop faible bras.

 

Ne tire jamais en vain cette épée pour le libre foyer de tes pères ! Sois avisé à la veille ; sois une tempête dans le combat !

 

Sois toujours prêt à te battre ! Cherche toujours le plus chaud de la mêlée. Épargne l’homme sans défense ; abats celui qui résiste.

 

Si ta troupe s’arrête, chancelante, si devant elle la bannière flotte vainement, sois comme une forte tour, brave le choc de la masse ennemie.

 

L’épée a dévoré tes frères, sept garçons dignes de l’Allemagne ! Ta mère l’apprit muette et raide de douleur, et elle expira !

 

Je suis seul maintenant, et sans force. Mais, mon entant, ton déshonneur me serait plus cruel sept fois que la mort des sept autres.

 

Ainsi donc, ne crains point la mort, et confie-toi à Dieu. Tant que tu combattras vaillamment, tu réjouiras le cœur de ton vieux père !

 

 

 

Friedrich Leopold von STOLBERG.

 

Paru dans la Revue européenne en 1831.

 

 

 

 

 

 

 

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