Halte d’été

 

 

Sur les chemins las de l’été

amis comme vos mains sont fraîches !

 

Toi dont le regard fatigué

n’est plus qu’un amas de détresse

toi qui ne comprends plus l’eau vive à flanc de mont

ni la stridulation des cigales

ni le bleu royal de la mer

ni les rochers martyrs de cent soleils démons

enfant à la mémoire calcinée

ô mon enfant !

pour qui les fontaines sont mortes

sans plaintes aux midis des portes

arrête-toi ferme les yeux :

ici commence le miracle

et la source qui naît du tabernacle.

 

Les paillassons du soir roussissent l’horizon.

Pas une étoile.

Mais la chambre où tu viens s’ouvre sur le repos

la mer a recueilli ses barques

l’ombre est ce parfum de lavande

à la table du linge blanc.

 

N’allume pas la lampe

ô mon enfant !

elle te ferait perdre nos visages

et le triomphe des raisins.

Et ne va plus rêver aux enfants qui voyagent.

 

Demain

te reprendront les fantaisies de l’aube

et la sueur qui coule au creux des reins.

 

Cueille l’oiseau du soir

et les fruits de paix du silence

accepte ce surplus d’amour

que les anges de Dieu mettent dans la balance

pour alléger ton cœur.

 

Mon enfant apaisé

ferme les yeux : ici commence le bonheur

ici prend fin la saison sèche.

 

Dans la nuit lourde de l’été

amis comme vos mains sont fraîches !

 

 

 

Charles THOMAS,

Aux plaines de mémoire,

Prix InterFrance de poésie,

Éditions du C.E.L.F., 1962.

 

 

 

 

 

 

www.biblisem.net