De l’âme contrite
de l’offense à Dieu
Seigneur, donne-moi la mort,
Avant que plus ne t’offense ;
Et que mon cœur soit fendu,
Plutôt qu’en mal persévère !
Seigneur, ne t’a pas servi,
De me montrer courtoisie ;
Tant me suis montré ingrat,
Et rempli de vilenie !
Mets une fin à ma vie,
Qui toujours t’a contrarié !
Mieux est que je sois occis
Que toi, Seigneur, offensé ;
Que ne m’amende, le vois,
Qu’à faire mal suis ardent ;
Condamne donc le suspens,
Qui s’est laissé choir au ban.
Commence à faire justice,
En m’enlevant la santé,
Au corps supprime l’office,
Que n’ait plus sa liberté ;
Puisque de prospérité
Jà n’a su que mal user.
Aux gens retire affection,
Que nul de moi ait pitié,
Puisque ne me suis soucié
D’avoir au faible amitié ;
Et ôte-moi la hardiesse,
Que je n’aille plus chantant.
S’assemblent les créatures,
À faire de moi vengeance !
Car mal ai usé de toutes
Contre la loi établie.
Chacune en moi peine ajoute,
Pour te venger, ô Seigneur !
N’est pas pour un temps la plainte
Que je dois pour toi gémir,
Pleurant sans cesse ma chute,
Devant de toi me priver ;
Ô cœur, comme y peux penser
Sans aller te consumant ?
Ô cœur, comment peux penser
Attrister ainsi Amour,
Qui de toi se doit priver,
Pour qui souffrit tel labeur ?
Or pleure son déshonneur
Et de toi-même n’aie cure !
Jacopone da TODI.
Traduit de l’ombrien par Pierre Barbet.