Les cloches de Noël

 

 

Minuit sonne au beffroi ! Dans l’ombre et le silence,

La cloche a tressailli ; sa grande voix s’élance

De son gosier d’airain pour redire aux mortels

Que le moment béni, le grand anniversaire,

Dans un suprême élan de piété sincère,

Réunit les chrétiens aux pieds des saints autels.

 

Tels, dans les champs sacrés, les échos sympathiques,

Redisant les accords du plus beau des cantiques,

Transmettaient aux tyrans comme aux persécutés

Le message d’amour apporté par des anges,

Lorsque le genre humain garrotté dans ses langes ;

Succombait sous le poids de ses iniquités.

 

Chaque année, à minuit, chez nous l’airain sonore

Redit ce chant joyeux qui signala l’aurore

Du jour où l’opprimé put dire avec orgueil :

« N’en déplaise aux puissants tous les hommes sont frères ;

« On l’oublie ici-bas, mais les lois arbitraires

« Jamais du Paradis ne franchiront le seuil. »

 

Avant que le soleil ait chassé la nuit sombre,

Quand la foule pieuse a regagné dans l’ombre

Le logis où l’attend un joyeux réveillon,

Chacun ébauche un somme embelli d’un beau rêve,

Qu’on interrompt parfois ; il faut bien qu’on se lève :

La cloche recommence un joyeux carillon.

 

Cloches, carillonnez, déplacez les atomes

De l’air et détruisez jusqu’aux moindres symptômes

De surdité morale ou d’assoupissement !

Sonnez, qu’en notre cœur votre voix métallique

Fasse toujours vibrer la fibre catholique

En rappelant du Christ l’heureux avènement.

 

 

 

                                                                            Ottawa, décembre 1887.

 

 

 

Rémi TREMBLAY, Coups d’aile et coups de bec,

Montréal, Imprimerie Gebhardt-Berthiaume, 1888.

 

 

 

 

 

 

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