Trois petites amies

 

 

 

 

 

par

 

 

 

 

 

Louise B. B...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Les compliments de M. et Mme Van Groenhoven ; ils prient mademoiselle d’assister au bal d’enfants qu’ils donnent samedi soir. »

Le domestique s’adressait à une jolie petite fille aux yeux bruns qui lui avait ouvert la porte.

« Ce sera une bien belle soirée, je vous l’assure, reprit le brave garçon. Allez vite demander à votre maman si vous pouvez venir. Si vous saviez combien d’invitations j’ai à faire ; j’en ai toute une longue liste ! Il y aura bien une centaine d’enfants ! »

La petite Emy Van Tol, les yeux tout brillants de joie, s’écria :

« Attendez-moi un instant, je reviens tout de suite. »

Et d’un bond elle atteignit l’escalier, se heurtant, dans sa course folle, contre le cordonnier qui descendait portant un seau.

« Holà, hé ! gronda-t-il ; petite, quel choc ! »

Mais la petite Emy avait poursuivi son chemin sans rien entendre ; et elle se précipita dans la pièce où sa mère travaillait, assise près de la fenêtre.

« Oh ! mère, s’écria-t-elle en lui jetant les bras autour du cou ; écoute, quel bonheur ! le domestique de Mme Van Groenhoven est là ; il vient m’inviter de sa part au bal d’enfants qu’elle donne samedi soir. Entends-tu, un vrai bal ! Mère, je puis y aller, n’est-ce pas ? J’ai été si sage pendant ces derniers jours... Chère maman, je serai si heureuse d’aller à ce bal ! »

Et la petite câline ne cessait de caresser et d’embrasser sa mère. Mais celle-ci la repoussa doucement et lui dit d’un air grave :

« Ma petite Emy sait que sa mère n’a d’autre désir que de la rendre heureuse ; cependant je ne puis t’accorder ce que tu demandes. Bientôt je t’expliquerai pourquoi je préfère que tu n’ailles pas à ce bal. Va dire au domestique que je remercie beaucoup M. et Mme Van Groenhoven de leur politesse ; mais que tu ne pourras pas te rendre chez eux. Va, et ne fais pas cette petite moue. »

Emy dut s’arrêter à l’extérieur de la chambre pour essuyer ses larmes avec son petit tablier ; puis elle descendit l’escalier bien plus lentement qu’elle ne l’avait monté, et transmit la réponse au domestique.

« Eh bien, mademoiselle, fit-il, j’en suis fâché ! Bonjour, je vais dire ça à madame. »

Et il s’en alla.

Pendant que le domestique achève de faire ses commissions, et qu’Emy remonte l’escalier, je vais vous donner quelques détails sur elle et sur sa mère.

Mme Van Tol était veuve et habitait, avec sa fille, un petit appartement situé dans l’une des rues les plus tranquilles de Rotterdam, cette ville à laquelle ses canaux, ses ponts innombrables donnent une si étrange physionomie.

La mère d’Emy était pauvre ; non si pauvre qu’elle dut mendier, mais il lui fallait travailler à l’aiguille du matin jusqu’au soir pour gagner sa vie et celle de son enfant. Car son mari, chirurgien de marine, n’avait pu laisser en mourant assez d’argent à sa femme pour qu’elle pût vivre dans l’oisiveté. Elle n’avait pas de domestique ; mais les vêtements d’Emy étaient toujours propres et bien raccommodés. Depuis deux ans la petite allait à une école primaire.

« Je ne pourrai pas te donner de la fortune, disait Mme Van Tol, il faut donc bien travailler et t’instruire, afin que, lorsque tu seras grande, tu puisses te suffire à toi-même. »

Emy fit attention aux paroles de sa mère et apprit bien. La maîtresse déclara qu’Emy était sa meilleure élève. La petite en fut heureuse, mais n’en tira pas vanité ; au contraire, elle aidait celles qui n’arrivaient pas à faire leurs devoirs, et les autres écoliers l’adoraient.

Retournons près d’elle.

Elle est assise à la fenêtre, et ses larmes coulent encore ; car la déception est grande ! Tous les jours, après l’école, on ne parle que du bal qui doit avoir lieu chez Lydie Van Groenhoven. Emy sait tout ce qui va se passer. Elle est sûre que ses amies les plus intimes, Betsy et Gonne, doivent y aller, parce que la maman de Lydie l’a dit à leur mère.

Mais on ne savait pas si Emy serait invitée. Ç’avait donc été une bien douce surprise que cette invitation. Mais, hélas ! ce n’avait été qu’une courte joie ; maman ne lui permettait pas d’accepter. Mais pourquoi pas ? Elle n’y comprenait rien.

« Emy, petite, dit la voix de sa mère ; veux-tu venir près de moi ? »

Alors sa mère lui prit la main.

« Sais-tu, reprit-elle, pourquoi je ne puis pas te laisser aller au bal ? »

Emy secoua négativement la tête, et de nouveau les larmes perlèrent dans ses yeux bruns ; mais sa mère les essuya avec deux baisers.

« Mon enfant, reprit-elle, je fais de mon mieux pour arriver à joindre les deux bouts ; mais c’est bien difficile, même avec la plus grande économie. Tu as de charmantes petites amies ; mais il ne faut jamais oublier qu’elles sont bien plus riches que nous. Je ne puis t’habiller que très simplement. Si je te donnais de beaux chapeaux et des mantelets élégants, il ne me resterait pas assez d’argent pour t’acheter à boire et à manger, et ce serait affreux. Si tu allais à ce bal, il faudrait que je t’achetasse des souliers neufs, une robe neuve ; et l’argent de mère n’y suffirait pas. Maintenant que préfères-tu ? Que mère travaille toute la nuit pour les magasins, afin de pouvoir t’acheter une toilette pour le bal ; ou veux-tu rester tranquillement près de moi, sachant qu’alors je pourrai me reposer à l’heure habituelle ? »

Naturellement, Emy choisit ce dernier parti et tâcha d’oublier son chagrin.

Le lendemain, à l’école, Betsy et Gonne, deux adorables petites blondes, se dirigèrent tout de suite vers Emy.

« Je sais, dirent-elles, que tu es invitée au bal. Quelle joie ! »

Emy répondit tristement :

« On m’a bien invitée, mais maman a dit non ; c’est bien cruel.

– Oh ! quel chagrin ! s’écria Gonne le visage tout attristé. Mais pourquoi ?

– Maman m’a dit que, pour aller au bal, il me faudrait des souliers neufs et une robe neuve, et que cela coûterait trop cher. »

Et en soupirant, elle retourna à ses leçons, et l’on peut lui pardonner d’avoir été moins attentive ces jours-là qu’elle ne l’était ordinairement. Toute la classe était invitée, toutes les petites filles se promettaient un grand plaisir, dont seule Emy ne devait pas jouir.

Betsy et Gonne, ces chères blondinettes, firent en rentrant chez elles un petit complot. Leur mère, Mme Van den Berg, habitait une superbe maison dans le beau quartier de la ville. Il y avait un jardinet devant la maison, et derrière, un grand jardin rempli de fleurs et d’arbres fruitiers. Les fenêtres, à guillotine, avaient une seule grande vitre, et tout annonçait la richesse de M. et Mme Van den Berg.

Dès qu’elles furent arrivées à la maison, Betsy et Gonne racontèrent tout à leur mère et la supplièrent d’acheter pour Emy les souliers et la robe.

Mme Van den Berg les embrassa :

« Vous êtes les enfants chéris de votre mère, leur dit-elle. Les amis doivent toujours s’entraider. Je vais me rendre chez Mme Van Tol et lui demander si elle permet que je me charge de la toilette d’Emy pour samedi. »

Les deux petites blondes se mirent à sauter, à danser, se réjouissant d’avance du bonheur qu’éprouverait Emy en apprenant la grosse nouvelle. Le jour même, la voiture de Mme Van den Berg s’arrêta devant la maison qu’habitait Mme Van Tol. Tout le monde se mit aux fenêtres, une voiture étant chose rare dans cette rue. D’abord la mère d’Emy refusa ce qu’on lui proposait, mais lorsque l’aimable visiteuse lui représenta qu’en refusant elle causerait un grand chagrin non seulement à sa propre enfant, mais aussi à ses deux petites amies, Mme Van Tol céda, et remercia chaleureusement l’excellente Mme Van den Berg du plaisir qu’elle allait donner à Emy. Personne ne fut plus surpris que cette dernière, personne ne fut plus heureux que nos trois petites amies ! Elles s’en donnèrent à cœur joie, dansant des rondes dans le corridor.

La maison avait pour Betsy et Gonne de puissantes attractions. Le père d’Emy, en sa qualité de chirurgien de vaisseau, avait visité beaucoup de pays étrangers ; il avait voyagé dans les Indes orientales et au Japon. Chaque fois qu’il revenait à la maison, il rapportait quelque curiosité. Depuis sa mort, Emy et sa mère conservaient, dans une étagère à vitrine, tous les cadeaux qu’il leur avait apportés.

Parmi ces merveilles, ce qui excitait le plus l’admiration de Betsy et de Gonne, c’était une poupée japonaise, aussi grande qu’un nouveau-né. La poupée reposait dans un panier tout garni de soie bleue, et ressemblait à un véritable baby, à un baby chinois, bien entendu, avec ses yeux bridés et retroussés vers les tempes.

« Ah ! s’écria Gonne, on est bien heureuse d’avoir une poupée comme celle-là ! »

Mme Van Tol leva sur elle ses yeux doux et bleus, qui, avec sa fraîche carnation, en faisaient encore une jolie Hollandaise.

« Oui, dit-elle, c’est là une belle poupée ; ce qu’il y a de plus intéressant, c’est qu’une histoire se rattache à elle.

– Ah ! une histoire, s’écria Gonne ; chère madame, racontez-nous-la !

– Volontiers, mes enfants, dit en souriant Mme Van Tol ; venez vous asseoir près de moi. »

Elle n’eut pas besoin de le dire deux fois.

« Cette poupée, fit-elle, a été apportée du Japon par mon mari. C’est dans ce lointain pays que, se promenant un jour, il vit un ouvrier assis à côté d’une route ; il paraissait très affligé. Le père d’Emy s’approcha et demanda à cet homme pourquoi il avait tant de chagrin.

– Ah ! monsieur, répondit-il ; mon enfant est bien malade, il n’y a dans les environs aucun médecin qui puisse le soigner, et je n’ai pas l’argent qu’il faut pour en faire venir un de la ville. »

Alors mon mari lui dit :

« Conduisez-moi près de l’enfant ; je tâcherai de le guérir, car je suis médecin. »

Tout joyeux, l’homme le conduisit dans sa maison de papier (c’est souvent ainsi que sont faites les habitations au Japon) et près de son enfant. Le baby était bien malade. Mais mon mari fut assez heureux pour le guérir. Vous devinez la reconnaissance de l’ouvrier ; mais il ne savait comment la témoigner au docteur. Enfin, un matin, il lui envoya sa femme avec cette poupée, et la Japonaise dit à mon mari que lorsque la poupée était arrivée chez elle, les cigognes, en même temps, y avaient apporté un petit enfant. Mon mari accepta la poupée avec reconnaissance ; le jour même, il se rendit à bord de son vaisseau, et, quelques mois après, il revint à la maison. Puis, quand on déballa le contenu des grandes caisses, je pris la poupée, et j’appris son histoire.

– Et la cigogne ? demanda Betsy ; est-elle venue aussi ? » Mme Van Tol indiqua Emy du geste.

« Oui, dit-elle, l’hiver se passa, et déjà les tulipes et les crocus ouvraient leurs corolles, quand la cigogne arriva. Portée par le vent tiède du midi, elle dirigea son vol vers la cheminée de ma maison, et y laissa tomber un petit paquet vivant. J’eus peur, vous le devinez bien, et cependant je fus contente ; car je savais ce qu’il y avait dans le paquet. »

Les enfants avaient écouté bouche béante, surtout Gonne, à qui la poupée japonaise devint encore plus chère qu’auparavant.

Enfin, samedi arriva. Ah ! combien l’attente avait paru longue !

Quand Emy rentra de l’école, sa mère lui montra la caisse venue de chez Mme Van den Berg. Emy l’ouvrit, et vit une robe bleu de ciel, avec de petits volants au bas, et ornée par derrière d’un superbe nœud de ruban. Dans le fond de la caisse, il y avait une paire de beaux petits souliers mordorés. Et tout allait à Emy comme si l’on avait moulé ses vêtements sur elle !

À sept heures et demie précises, Betsy et Gonne vinrent en voiture chercher Emy, et la conduisirent au bal. Ce fut charmant ! Lydia et sa mère reçurent les petits invités d’une manière toute cordiale. D’abord ces derniers, un peu sérieux, parurent embarrassés ; mais, dès que le maître de danse entra, et que la musique commença, les petits pieds et les petites langues se délièrent, et l’on fut tout au plaisir.

Entre deux danses, Betsy, la figure rouge comme une pivoine, vint dire à Emy :

« Quel plaisir ! Combien je voudrais qu’il y eût un bal tous les jours ! »

Alors le domestique fit sa tournée avec les petites serviettes en papier dont on se sert en Hollande : des gâteaux, de la limonade, des glaces, absolument comme s’il eût deviné ce qui pouvait le mieux plaire aux enfants.

Mais le plus beau de tout, ce fut le cotillon ; du moins, c’est ce que pensa Emy, sauf que c’était la fin de la soirée. Combien de figures on exécuta ! Et la figure avec les masques !

D’abord toute une troupe de garçons sortit de la salle ; et ils revinrent ayant tous la tête cachée sous un mouchoir. Emy ne les reconnaissait plus du tout, et les petites filles se mirent à rire. Chacune d’elles dut enlever le mouchoir d’un jeune garçon et danser avec lui.

Emy en fit autant, et poussa un petit cri d’effroi quand elle enleva le mouchoir, en apercevant un petit garçon à visage couvert d’un grand masque noir, avec de grosses lèvres et de gros yeux blancs en boule de loto. Cependant il fallait bien danser avec lui ; mais elle baissa les yeux pour ne pas le voir. Elle fut contente quand le tour de valse fut terminé. Alors son danseur ôta son masque, et quelle surprise ! Emy reconnut bien vite son petit voisin Piet, qui, lorsqu’elle rentrait de l’école, la taquinait en tirant ses tresses, puis lui chatouillait le cou avec une paille, et l’hiver, quand la neige couvrait le sol, lui en frottait les joues ; et maintenant ce méchant garçon rayonnait de joie parce qu’il avait fait si peur à Emy !

Tout a une fin, hélas ! et le bal se termina ; mais les trois petites amies n’en finissaient pas de tout raconter à leurs mères, et, pendant le reste de la nuit, elles rêvèrent de danses, de limonades, de garçons à tête d’âne, à visage de nègre, et de beaucoup d’autres choses encore.

Le mercredi suivant était l’anniversaire de la naissance de Gonne ; ce fut encore une fête. Emy devait venir jouer chez ses amies depuis midi jusqu’au soir. Le matin, lorsqu’elle vint à l’école, elle avait un visage tout à fait mystérieux, et, se dirigeant vers Gonne, elle lui murmura à l’oreille :

« Je sais, je sais, ce que tu ne sais pas... devine un peu, ce que cela peut être ?

– C’est une chose agréable.

– Extraordinairement agréable, fit Emy.

– Est-ce une chose qui me plaira ?

– Extraordinairement.

– Ça se mange ? demanda Gonne.

– Non, fit Emy en riant ; ça ne serait pas bon à manger.

– C’est grand ?

– Extraordinairement grand... Mais il ne faut pas en demander davantage. »

Gonne n’en fut que plus curieuse.

« Voyons, dis-moi ce que c’est, fit-elle.

– Non, dit Emy ; il faut de la patience ; maman m’a dit que tu pourrais savoir ce que c’est à midi ; mais pas avant. »

Gonne attendit avec une grande impatience ; Emy aussi. Enfin cette dernière arriva chez ses petites amies ; elle portait quelque chose d’assez lourd, cela se voyait bien, car elle courait en se tenant toute de travers. Dès qu’elle arriva, elle déposa soigneusement le paquet sur la table.

« Gonne, dit-elle, ceci est pour toi, de la part de maman, pour fêter ton anniversaire ; et maman te le donne, parce que toi et ta sœur vous avez été si gentilles pour moi, qu’il faut bien que je vous fasse un plaisir aussi. »

Gonne ôta soigneusement la ficelle et le papier, et les yeux de la petite fille s’écarquillèrent à la vue de la belle poupée japonaise, admirablement vêtue comme un vrai baby ! Quelle surprise ! Gonne était si heureuse qu’elle se roula par terre et eût marché la tête en bas, comme le clown au cirque, si elle l’avait osé.

« Maintenant, dit Emy, la cigogne apportera aussi quelque chose.

– Crois-tu ? demanda Gonne ; je voudrais tant avoir un petit frère.

– Oui, fit Betsy ; il faudra bien surveiller la cigogne quand elle arrivera. »

La journée fut très gaie ; quand la pendule sonna huit heures, on vint chercher Emy ; Betsy et Gonne se mirent au lit, et s’enfoncèrent si bien sous les couvertures qu’on ne vit plus que leurs deux petits nez roses.

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Plusieurs mois s’écoulèrent. Un dimanche, par un bel après-midi, nos trois petites amies se promenaient avec la bonne d’enfants. L’hiver s’en était allé avec sa neige et sa glace, et le gai printemps l’avait remplacé. Les petites feuilles se montraient sur les arbres et les buissons, ainsi que les fleurettes dans l’herbe.

Tout à coup Betty, qui regardait en l’air, s’écria :

« Voyez donc ce grand oiseau qui vole là-bas !

– C’est une cigogne, dit la servante.

– Une cigogne ! s’écria Gonne ; est-ce qu’elle porte un paquet ?

– Non, riposta Mietje ; elle ne porte rien ; mais peut-être retourne-t-elle maintenant à son nid. Est-ce que vous attendez quelque chose, mademoiselle Gonne ?

– Oui, fit la petite ; je voudrais tant qu’elle m’apportât un petit frère.

– Ah ! oh ! fit Mietje ; mais l’avez-vous demandé au bon Dieu ?... Non ? Alors il faut le faire. Quand les cigognes apportent un cadeau, c’est parce que les enfants l’ont demandé au bon Dieu. »

Le soir, lorsque Gonne fit sa prière, elle s’interrompit pour demander à Betsy, déjà à moitié endormie, ce qu’elle préférait : un frère ou une sœur ?

« Un frère. »

Alors Gonne le demanda dans sa prière.

Les deux petites filles dormirent comme des marmottes. Le lendemain matin, papa les conduisit bien doucement dans la chambre de leur mère ; et là, dans un berceau, elles virent un petit frère tout rose et tout potelé ! N’était-ce pas ravissant ?

Naturellement la grande nouvelle fut racontée tout de suite à Emy.

« Emy, s’écria Gonne en courant vers sa petite amie, la cigogne, de grand matin, nous a apporté un frère. Il est beaucoup plus beau que la poupée !

– Ah ! quelle bonne petite société cela va vous faire ! Est-ce qu’il parle ?

– Non, fit Betsy ; maman dit qu’il faut attendre encore un peu ; mais comme ce sera amusant de jouer avec lui, n’est-ce pas ?

– Oui, dit Emy. Mais si vous n’aviez pas eu la poupée, la cigogne n’aurait rien eu pour vous !

– Ah ! c’est bien vrai, firent les deux petites blondes ; il faut donc bien soigner la poupée.

– Mais, dit Betsy, je tiens encore plus au petit frère. »

Les autres furent de son avis.

Et nous en resterons là avec notre petit trio.

 

 

Louise B. B..., Trois petites amies.

 

Paru dans la Revue britannique en 1884.

 

Traduit par Maurice REYNOLD.

 

 

 

 

 

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