Le baptême

 

 

 

 

 

par

 

 

 

 

 

Sebastian BRUNNER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ingo, duc de Carinthie, avait encore plusieurs de ses parents qui n’étaient pas disposés à renoncer au culte des idoles. Or il arriva qu’en 791, il fit préparer un grand festin, auquel il invita ses parents encore païens, ainsi qu’une boule immense d’ouvriers pauvres, mais chrétiens. Les grands furent servis dans la cour avec un pain tout ordinaire, de la mauvaise viande, du vin commun, et avec de la vaisselle en terre, tandis que les pauvres furent placés à la table du duc, furent servis en vins précieux et en coupes d’argent, rassasiés des mets les plus exquis ; en un mot, le duc fit tout ce qui dépendait de lui pour les recevoir d’une manière vraiment princière. Les nobles et les grands, sachant à peine s’ils devaient en croire leurs yeux, tant ils étaient étonnés, furent vivement blessés de cette conduite, et, ne pouvant plus contenir les éclats de leur morgue blessée au vif, ils entrèrent furieux dans la salle où mangeait le prince, et lui demandèrent le motif de cette préférence.

Mais le prince, sans se laisser toucher par ces réclamations insolentes, répondit avec calme : « Ne soyez pas trop étonnés de ma conduite. Ces hommes que vous voyez là, quoique pauvres en biens temporels, ont été enrichis, par le Baptême, de grâces divines ; ils sont les enfants et les héritiers du Très-Haut : je les reconnais pour mes frères en Jésus-Christ. Vous, au contraire, bien que riches selon le siècle, vous êtes néanmoins pauvres en trésors spirituels ; votre âme est encore souillée de la tache originelle et d’une foule d’autres fautes qui vous sont personnelles ; vous êtes encore les esclaves des ténèbres, et les adorateurs de stupides divinités. Cela étant, qu’y a-t-il de surprenant, si je regarde notre société comme déshonorante, et si, au contraire, je me fais honneur d’avoir autour de moi mes frères chrétiens ? »

Ce langage calme, mais ferme et sévère du duc, eut pour résultat d’amener la plupart des grands et des nobles à se convertir au Christianisme ; car bientôt après ils se firent baptiser par Arno, évêque de Salzbourg.

 

 

Sebastian BRUNNER.

 

Recueilli dans Corbeille de légendes et d’histoire,

par l’abbé Allègre, 1888.

 

 

 

 

 

 

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