Le dernier don

 

 

L’Éternel en courroux avait dit : « Chasse-les ! »

Et l’ange du Seigneur aux pauvres exilés

Montra, du seuil chéri des douces solitudes,

Le chemin de douleur pavé de servitudes !

 

L’œil sec, désespérés, courbés, silencieux,

Les proscrits lentement s’éloignèrent des cieux.

Ils n’avaient pas encore atteint ce triste monde

Que l’Éternel, saisi d’une pitié profonde,

Rappela devant lui les deux infortunés :

« Ève, Adam, cria-t-il, je vous ai condamnés ;

Mais trop lourd est pour vous l’arrêt irrévocable !

Un père vous chérit dans le juge implacable ;

Dans mon Éden fleuri, pour l’expiation,

Cueillez, ô malheureux, la consolation !

Au bord de ce lis pur, à corolle irisée,

Rayonnent chastement deux gouttes de rosée :

Prenez-les, mes enfants ! Lorsqu’elles perleront

En vos yeux consumés par le deuil et l’affront,

Sur la terre d’exil qui roule dans ses brumes,

Elles adouciront vos acres amertumes ;

Et moi, je vous dirai courage, du ciel bleu ! »

 

– Et nos premiers parents obéissant à Dieu,

Du jardin d’innocence, emportant leurs alarmes,

Sortirent, résignés, les yeux remplis de larmes.

 

 

 

Georges de PORTO-RICHE, Tout n’est pas rose, 1877.

 

 

 

 

 

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