Adieux à la lyre

 

 

Tes cordes, ô divine lyre,

Cessent de frémir sous mes doigts ;

Dans mon sein s’endort le délire :

Un froid mortel glace ma voix.

 

Je ne veux pas m’éteindre encore,

L’harmonie est un don sacré ;

Ranime-toi, lyre sonore,

Du ciel je me sens inspiré.

 

Mais c’est en vain que le génie

De sa sève anime mon cœur ;

Le siècle est sourd à l’harmonie :

Le poète est seul, il se meurt.

 

Nul ne réponde à sa prière ;

On se rit de son tendre amour,

Et voilà pourquoi le trouvère

Va toucher à son dernier jour.

 

Prés verdoyants, sombres bocages,

Je n’ai plus pour vous de concerts ;

Champs que j’aimais, riants rivages,

Vous me semblez de froids déserts.

 

Je suis consumé de tristesse,

Je me fane dans mon printemps….

Dieu, prends pitié de ma jeunesse,

Rends-moi la vie avec mes chants !

 

 

 

Désiré BAUCHER.

 

Paru dans La France littéraire, artistique, scientifique en 1860.

 

 

 

 

www.biblisem.net